mercredi 28 février 2024

Traité (ou Edit) de Nérac


3-28 février 1579 - Les conférences de Nérac.


Traité, également appelé Edit de Nérac, intervient en préambule de la VIIème guerre de religion, confirmant l'édit de Poitiers. Il donne 14 places de sûreté supplémentaires pour les protestants pour six mois. Six mois plus tard, les protestants refusent de rendre les places.

Château de Nérac où se déroulèrent les conférences

Ça s'est passé il y a 445 ans.

La cour de Nérac à la fin du XVIe siècle est souvent idéalisée : nous la voyons comme le lieu témoin de "l’amour" entre Marguerite et Henri. Pourtant, il s’agit avant tout d’une cour politisée au service du roi de Navarre. En effet, à cette époque, le royaume de France est plongée dans les guerres de religion depuis 1562 selon l’historiographie officielle, même si les premiers affrontements entre catholiques et protestants sont antérieurs. Ils débutent en effet sous le règne de François 1er. Ce dernier a d’abord une politique accommodante vis-à-vis des protestants. Puis il opère un changement à 180 degrés lorsque les plus radicaux d’entre eux en viennent à contester l’autorité de la couronne à compter de la célèbre "affaire des placards" de 1537.

En 1579, la question protestante occupe la couronne depuis près de quarante ans déjà, alors que le pays est gouverné par le petit-fils de François 1er : Henri III. Catherine de Médicis décide donc de mettre en place une énième paix entre catholiques et protestants. Pour ce faire, elle décide de se rendre sur les bords de Baïse afin de rencontrer son gendre Henri de Navarre, pour signer un traité de paix .

Dès l’annonce de sa venue, le roi de Navarre met tout en œuvre pour la recevoir dignement et chercher à l’impressionner afin d’être en position de force au moment des négociations. Pour cela, il fait transporter en son château de Nérac un mobilier magnifique, il achète des chevaux prestigieux, il fait préparer de nombreux bals et banquets, il organise journellement des chasses et des activités variées.

Henri affiche à Nérac un luxe inouï. Cependant, Catherine de Médicis, femme rompue à la politique, ne semble pas dupe de ces manœuvres et la mise en place de la paix est remise en question à maintes reprises.

Le 3 février 1579, Catherine de Médicis étant à Port-Sainte-Marie arrive à Nérac pour presider avec son gendre, les conférences entre catholiques et protestants. La reine-mère séjourne au château de Nérac avec son train du 4 février au 4 mars. Les Conférences débutent le lendemain de son arrivée, pour se terminer le 25 février. Elle écrit en effet au maréchal de Damville que la conférence est terminée et que tout a été résolu quant à l’exécution entière de l’Édit.

Il faut attendre toutefois le 28 février pour que les 27 articles "secrets" de la conférence de Nérac soient signés : il s’agissait d’une victoire pour la reine mère, puisque seulement trois villes en Guyenne et onze en Languedoc étaient concédées en garde pour six mois aux huguenots. Quant aux huit places de sûreté originellement octroyées par l’édit de Poitiers, elles devaient comme prévu être restituées au bout de six années.

La signature du roi de France Henri III sera apposée le 14 mars suivant. La reine mère peut ensuite quitter Nérac, après désignation de délégués chargés de se rendre dans les villes pour y faire appliquer les articles enfin cosignés, sur le début mars.

Mais six mois plus tard, les protestants refusent de rendre les places, ce qui déclenche la VIIe guerre de religion. Elle sera conclue un an plus tard, le 26 novembre 1580 à Fleix. La Paix de Fleix confirme définitivement les concessions de Nérac.

Les guerres de religion opposeront l’état aux Huguenots pendant encore trente-six ans.


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Sources : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia.
Pour les curieux : les 27 articles du traité : http://elec.enc.sorbonne.fr/editsdepacification/html/edit_10.html

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lundi 26 février 2024

Naissance d'un géant.


7 ventôse an X - Ce siècle avait deux ans !


26 février 1802 : Besançon, 140 Grande Rue, naissance de Victor-Marie Hugo, fils du général d'Empire Joseph Léopold Sigisbert Hugo et de Sophie Trébuchet .

Naissance de Victor Hugo, gravure sur cuivre, 1881,
Bibliothèque municipale de Besançon

Ça s'est passé il y a 222 ans.

"Ce siècle avait deux ans ! Rome remplaçait Sparte,
Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte,
Et du premier consul, déjà, par maint endroit,
Le front de l'empereur brisait le masque étroit.
Alors dans Besançon, vieille ville espagnole,
Jeté comme la graine au gré de l'air qui vole,
Naquit d'un sang breton et lorrain à la fois
Un enfant sans couleur, sans regard et sans voix ;
Si débile qu'il fût, ainsi qu'une chimère,
Abandonné de tous, excepté de sa mère,
Et que son cou ployé comme un frêle roseau
Fit faire en même temps sa bière et son berceau.
Cet enfant que la vie effaçait de son livre,
Et qui n'avait pas même un lendemain à vivre,
C'est moi."

Célèbre poème, "Ce siècle avait deux ans !", de Victor Hugo, publié en 1831, dans le recueil "Les feuilles d'automne".


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Pour les curieux : André Maurois, "Olympio ou la Vie de Victor Hugo", Paris, Hachette, 1985.

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dimanche 25 février 2024

Révolte de la Harelle


24-25-26 février 1382 - "Haro ! Haro ! ..."


En 1382, la Harelle de Rouen coïncide avec les soulèvements populaires à travers le royaume : Paris (les Maillotins), la Flandre, le Midi languedocien (les Tuchins)… contre le rétablissement de l’impôt.

Rouen : la révolte de la Harelle

Ça s'est passé il y a 642 ans.

Dans la seconde moitié du XIVe siècle, la ville de Rouen est secouée par diverses révoltes. La fiscalité est au cœur de ces soulèvements populaires. Cependant, ces grandes périodes de crise ne concernent pas uniquement le fait normand ; elles font écho aux troubles politiques de la royauté. En 1382, la harelle de Rouen coïncide avec les soulèvements populaires à travers le royaume : Paris, la Flandre, le Midi languedocien… contre le rétablissement de l’impôt.

La Harelle de 1382 est directement lié à la fiscalité du pays.

Sur son lit de mort, Charles V avait ordonné la suppression des fouages, un impôt payé par feu (foyer). Cependant, le royaume a besoin d’argent. Peu après son accession au trône, Charles VI lève de nouveaux impôts. Les Etats de Normandie se réunissent le 17 février 1381 et votent une aide par feu d’un à six blancs par semaine, ce pendant un an et selon la fortune du foyer. Le 27 mars de cette même année, sont nommés des généraux gouverneurs afin de veiller à la bonne perception des impôts. Cette nouvelle levée d’impôts fut, évidemment, mal accueillie.

Début janvier 1382, les généraux gouverneurs convoquent à Rouen Béranger Loutrel, receveur des aides, afin de s’entendre sur une nouvelle augmentation des taxes. Dès le mois de février 1382, les officiers imposent une taxe plus élevée aux habitants du pays.

A Rouen, la révolte éclate immédiatement en réponse à cette nouvelle augmentation des taxes. Au début de cette révolte, le désordre est grand et les événements sont quelque peu confus. Pendant trois jours, Rouen vit dans un univers clos. Selon Pierre Cochon, l’émotion fut le fait "de merdalle comme de dignans, drapiers et gens de pour estoffle" mais il accuse aussi "auncunz gros marchands et vinetiers" qui "couvertement les soustenaient" (Chronique de Pierre Cochon). Pendant trois jours, les portes furent fermées, les cloches cessèrent de sonner, sauf celle du beffroi de la Commune, et on délivra les prisonniers de toutes les prisons. Les émeutiers s’en prirent aux anciens maires de la ville. La maison de Guérout de Maromme, est vandalisée.

Les cloches, qui avaient sonné le tocsin, sont descendues...

Dans la nuit du 24 au 25, il y eut d’autres scènes de pillage et de violences contre des prêtres, des Juifs ou des prêteurs à gages (Malgré leur expulsion du royaume en 1306 par Philippe IV le Bel). L’aspect social de l’émeute est alors évident. Elle renvoie aux événements de la fin du XIIIe-début XIVe siècle. Les émeutiers ont bien oublié le fisc ! Devant la "fureur d’icelle merdalle", les riches bourgeois de la ville ont cherché refuge dans les différents couvents.

Le 25 février, les dirigeants de Rouen, qui avaient cédé à la panique, songent désormais à résister. Dès lors, des gardes sont placés à chaque endroit où les émeutiers sont susceptibles de se réunir. Les dirigeants de la ville songent ensuite à tirer profit de cette agitation en se tournant contre les établissements religieux. On s’attaque au chapitre cathédral en lui faisant renoncer à la rente annuelle des 400 livres qu’il percevait sur les halles et moulins de la ville. L’abbé de Saint-Ouen doit abandonner ses droits de baronnerie et de justice dans Rouen et sa banlieue. Toutes ces renonciations sont dressées dans un acte solennel et on brûle les actes authentiques.

Le 26, au cimetière Saint-Ouen, on fit lecture de l’acte fondamental qu’était la "Charte aux Normands" (accordée par Louis X, en 1315). La révolte se calme subitement et les dirigeants de la ville, inquiets, envoyèrent une délégation au roi, composée de clercs, de bourgeois et du maréchal de Blainville afin de le faire céder. On répondit : "il iroit à Rouen et saroit qui avoit mengié le lart " (Chronique de Pierre Cochon)

Après avoir maté la révolte parisienne, Charles VI entre dans Rouen le 29 mars avec une armée, casque en têtes et épées nues. Certains émeutiers avaient été exécutés avant l’arrivée du roi, les armes des bourgeois et les chaînes qui barraient les rues avaient été portées au château : le roi entre alors dans une ville conquise.

La principale sanction fut la suppression de la Commune, de son administration et de ses privilèges. L’impôt contesté fut levé et s’y ajouta une aide de huit deniers par livre sur les denrées et marchandises. Le 5 avril, veille de Pâques, le roi rendit armes et chaînes et pardonna des civiles et criminelles. Seuls en sont exclus ceux qui se sont enfuis ou qui sont prisonniers. Cependant, le roi ne rendit pas la Commune.

A noter : À peine cinq mois plus tard, le 1er août 1382, une seconde Harelle éclata, et comme la précédente, pour cause fiscale, lorsque les collecteurs des aides installent leurs buffets à la halle aux draps, drapiers et bouchers, ainsi que des habitants de la ville et des faubourgs, se rassemblent, renversent les buffets et forcent les receveurs à s’enfuir. Mais le capitaine de Rouen, Guillaume de Bellengues, avait pris ses précautions et la révolte tourna court. Et puis on ne discute pas les levées de taxes qui doivent financer la guerre. Une guerre qui débute en Flandre, pour réprimer une autre révolte antifiscale, celle des tisserands de Gand.


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Sources : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia et du texte d'Alain Dadourny "Les émeutes fiscales à Rouen dans la seconde moitié du XIVe siècle".
Pour les curieux : de Boris Bove, "1328-1453, le temps de la guerre de Cent Ans". Collection Folio Histoire de France n° 299.

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samedi 24 février 2024

Louis-Philippe 1er


24 février 1848 - "Pire que Charles X, cent fois pire que Charles X...".


Le roi des Français Louis-Philippe 1er abdique et part en exil au terme de trois jours d'émeutes. C'est la naissance de la IIe République.

Louis-Philippe 1er, roi des Français de 1830 à 1848

Ça s'est passé il y a 176 ans.

La révolte couvait depuis longtemps. Nous sommes en pleine époque des banquets républicains : des dizaines de personnes qui se réunissent, officiellement pour manger, officieusement pour parler politique bien sûr, et brasser des idées républicaines !

Ces repas sont organisés depuis plusieurs mois pour contourner l’interdiction des réunions politiques. Mais personne n’est dupe et surtout pas le gouvernement qui voit dans ces banquets, à raison, une menace pour la monarchie de Juillet.

Le 22 février 1848 était organisé l’un de ces banquets, mais il est interdit par les autorités. C’est l’étincelle qui manquait aux foules pour s’enflammer. Les barricades sont hissées dans Paris et le 23 février, une manifestation dégénère, des soldats tirent et tuent 52 insurgés. La ville est à feu et à sang. Le roi Louis-Philippe tente de renvoyer Guizot, très impopulaire, et de rappeler Thiers aux ministères. Mais il est déjà trop tard. Les insurgés se pressent devant les Tuileries. Le lendemain, 24 février, Louis-Philippe n’a plus le choix. Au terme de 17 ans de règne, à midi, il abdique en faveur de son petit-fils, Philippe d'Orléans, et part en exil.

Voyageant dans une voiture banale sous le nom de "Mr. Smith", le roi déchu embarque le 2 mars 1848 au Havre sur un paquebot en direction de l'Angleterre où il s'installe avec sa famille au château de Claremont (Surrey) mis à disposition par la reine Victoria.

Ce même jour, 24 février, à 15 heures, la Deuxième République est proclamée par Alphonse de Lamartine, entouré des révolutionnaires parisiens. Vers 20 heures, un gouvernement provisoire est mis en place, mettant ainsi fin à la monarchie de Juillet.

Cette Deuxième République ne durera pas très longtemps. En décembre 1851, Louis-Napoléon Bonaparte prend le pouvoir et instaure bientôt le Second Empire.

Mais c’est une autre histoire...


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia. Pour les curieux : d'Arnaud Teyssier, Louis Philippe. Le dernier roi des Français, Paris, Perrin, 2010, 450 p

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jeudi 22 février 2024

Traité de Mantes


22 février 1354 - Fin d'une "querelle domestique".


Le traité de Mantes fut signé le 22 février 1354 à Mantes par Jean II dit le Bon, de France et Charles II dit le Mauvais, de Navarre.

Jean II le Bon

Ça s'est passé il y a 670 ans.

En pleine guerre de Cent Ans, le texte prévoit des échanges territoriaux entre les deux couronnes, essentiellement en île de France et dans le Vexin. Charles II le Mauvais, roi de Navarre accepta de céder Asnières-sur-Oise, Pontoise et Beaumont. En contrepartie il reçoit le comté de Beaumont-le-Roger, les châteaux de Breteuil, Conches et de Pont-Audemer, le clos du Cotentin avec la ville de Cherbourg, les vicomtés de Carentan, Coutances et Valognes en Normandie. Ce traité lui donnet également la permission de tenir chaque année un échiquier, prérogative ducale et surtout les affaires ne pourront plus être jugées en appel à Paris.

Le traité règle également la question de la dot de Jeanne de France, la femme de Charles II de Navarre et fille de Jean II. En jeu : soixante mille deniers d’or.

Lorsque l'on étudie de près ce traité, on se rend compte que le roi de Navarre est largement gagnant, malgré la perte des châtellenies du Vexin et de l'Île-de-France.

Il est confirmé et précisé par le traité de Valognes signé l'année suivante le 10 septembre 1355, après maintes plaintes du roi Charles II de Navarre auprès du pape. En effet Charles II de Navarre se plaignait des mauvais traitements que lui infligeait Jean II de France (Tentative d'assassinat par Jean le Bon sur les personnes de Charles II de Navarre et ses frères Philippe et Louis à l'occasion d'un dîner en août 1354). Le roi de Navarre réussit à apitoyer le pape Innocent VI et le Conseil royal, ceux-ci demandèrent la clémence pour Charles II le Mauvais. Le roi de France se méfiait des Anglais, mais malgré tout Jean II le Bon accepta avec regret de traiter avec son gendre le roi de Navarre. En outre, le roi de France rendait à Charles II de Navarre tous ses biens et privilèges.

Jean II ne le sait pas encore mais il sera fait prisonnier par les Anglais deux ans plus tard, à la suite de la bataille de Poitiers de 1356.

Exilé à Londres pendant quatre ans, il regagne la France en 1360 après avoir autorisé la partition du pays au bénéfice des Anglais en vertu du traité de Brétigny du 8 mai de la même année.

Il termine piteusement son règne le 8 avril 1364 à l’hôtel de Savoie de Londres, ville qu’il avait rejoint quelques semaines plus tôt pour tenter de renégocier les clauses financières du traité de Brétigny.


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia. Pour les curieux : Georges Bordonove, Les Rois qui ont fait la France - Les Valois - Charles V le Sage, t. 1, Pygmalion, 1988.

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lundi 19 février 2024

L'Assassinat de Clemenceau


19 février 1919 - On a tiré sur Clemenceau


Georges Clemenceau quitte son domicile de la rue Benjamin Franklin pour gagner le ministère de la Guerre, lorsqu'un jeune anarchiste de 23 ans tire neuf balles sur sa voiture. L'une d'elles atteint le président du Conseil entre les poumons...

Clémenceau, chez lui, à sa table de travail

Ça s'est passé il y a 105 ans.

... non mortelle, elle ne sera jamais extraite. L'assassin, un ouvrier du nom d'Émile Cottin, est prestement condamné à mort le 14 mars 1919. Mais le même mois, avant que sa peine soit commuée, Raoul Villain, l'assassin de Jean Jaurès, est, lui, acquitté ! Ces deux jugements, l'un et l'autre excessifs, vont provoquer une rupture de l'Union sacrée qui avait uni la droite et la gauche pendant la Grande Guerre...

Trois mois après l'armistice qui a mis fin à la Première Guerre mondiale, Georges Clemenceau demeure aux commandes du pays comme président du Conseil (l'équivalent de Premier ministre) et ministre de la Guerre. Après avoir réprimé les tentations défaitistes, ressoudé le pays et assuré la victoire, il lui appartient maintenant de préparer la paix, en concertation avec les délégations étrangères et ses alliés, le Britannique Lloyd George, l'Italien Orlando et surtout l'Américain Wilson. C'est dire le poids des responsabilités qui pèse sur ses épaules.

Le "Tigre" ne change pas pour autant ses habitudes. À 77 ans, il reste fidèle à une hygiène de vie très stricte. Tous les matins, à 8h45, après une séance de gymnastique et un petit-déjeuner très léger, il quitte son appartement de quatre pièces du 8, rue Franklin, près du Trocadéro. À la porte de l'immeuble l'attendent son chauffeur et son garde du corps. Quelques agents de police font les cent pas car, n'est-ce pas ? on ne sait jamais.

Ce 19 février 1919, personne ne fait attention à un jeune homme pâle qui, lui-même, feint de détailler le contenu d'une boutique. Quand Clemenceau monte à l'arrière de sa limousine, il court derrière elle, sort un revolver et tire plusieurs coups. L'une des premières balles, par ricochet, blesse l'un des agents en faction. Le chauffeur accélère mais prend le tournant habituel, vers le ministère, ce qui permet au tireur de rattraper la voiture et de décharger son arme en direction de Clemenceau.

Les policiers et quelques badauds et voisins ont vite fait de se ruer vers l'assassin. Celui-ci jette son arme avant d'être roué de coups. Un peintre qui passait par là vient à son secours en croyant bien faire. Cela lui vaudra trois jours de poste...

En attendant, Clemenceau, qui avoue avoir mal, demande qu'on le ramène à son domicile. Il s'installe dans un fauteuil et les médecins diagnostiquent deux éraflures au bras, une à la main gauche et une balle entre les deux poumons. Ils vont rapidement renoncer à extraire celle-ci et feront confiance à la robuste constitution de Clemenceau pour que la balle finisse par s'enkyster. De fait, le "Tigre" l'emportera dans sa tombe dix ans plus tard.

Comme le devoir ne saurait attendre et que, de toute façon, il ne supporte pas l'inaction, Clemenceau va se remettre sur pied en une semaine, sans jamais cesser de recevoir à son domicile dossiers et visiteurs. Et comme il ne perd pas son humour pour si peu, il glisse à un visiteur : "Je ne savais pas que la chasse au tigre était ouverte à Paris !".

Les hommages affluent de toutes les capitales. Laïcard endurci, Clemenceau a même la surprise de recevoir un message du pape Benoît XV : "Il ne manquait plus que cela", marmonne-t-il. Mais il est par-dessus tout ému par les messages des anonymes qui transforment rapidement son appartement en serre fleurie ! Son rival de toujours, le président de la République Raymond Poincaré, s'irrite en privé de cette popularité : "S'il mourait, on en ferait un Dieu !".

De fait, l'attentat a pour effet paradoxal de porter à son zénith la popularité du président du Conseil. Il n'en est que mieux armé pour poursuivre les négociations de paix.

L'enquête de police confirme l'acte d'un tueur isolé. Après une instruction exceptionnellement rapide, le procès s'ouvre devant le Conseil de guerre, le 14 mars 1919, le jour même des vingt-trois ans de l'accusé, un certain Émile Cottin

Devant la cour comme devant les policiers qui l'ont interrogé, Émile Cottin fait pâle figure. Introverti, sans instruction, sans élocution, il déçoit aussi les journalistes et le public. "Quel petit homme pour un si grand crime !" écrit L'Homme libre, le journal de Clemenceau.

De fait, né dans un milieu modeste, à Creil, Émile Cottin devient ouvrier ébéniste. Quand survient la guerre, en 1914, il aspire à s'engager mais est réformé à son grand désespoir en raison d'une faiblesse cardiaque. L'année suivante, en trichant sur son état de santé, il arrive à se faire enfin mobiliser mais pour peu de temps. Renvoyé dans son foyer, il sert dans la défense civile, à Compiègne, non sans réel courage. À l'usine, en 1917, il lit avec passion les feuilles anarchistes.

L'idée de tuer Clemenceau, en qui il voit avant tout un ennemi de la classe ouvrière, lui vient à l'occasion des grèves de mai 1918. Lentement, il prépare son coup, tout en travaillant dans des usines aéronautiques de la région parisienne.

Le Troisième conseil de guerre, présidé par le colonel Hyvert, est saisi de l'instruction. Émile Cottin déclare : "Je tiens tous les gouvernements responsables de toutes les guerres ayant eu pour résultat le meurtre de millions d'individus". Son avocat Oscar Bloch en appelle au Clemenceau journaliste qui, au siècle précédent, prenait la défense des anarchistes, victimes de la curée médiatique, et s'opposait à la peine de mort : "Je refuse de déshonorer la société en lui offrant pour se défendre les mêmes armes que l'assassin", écrivait-il. La mère de l'accusé intervient par surprise, humble et en pleurs, en regrettant que l'on n'ait pas permis à son fils de s'engager et de mourir en héros !

Le verdict est prononcé le 14 mars 1919. Il est sans surprise. C'est la mort. La justice se veut impitoyable à l'égard du crime suprême, le crime de lèse-majesté. L'embarras dans l'opinion publique et la presse est palpable : que gagnera-t-on à exécuter un si petit personnage que Cottin ?

On a à peine le temps d'en débattre que voilà que s'ouvre dix jours plus tard, le 24 mars 1919, le procès de Raoul Villain, l'assassin du tribun socialiste Jean Jaurès, dont l'attentat est survenu cinq ans plus tôt (31 juillet 1914).

Par égard pour les convictions abolitionnistes de Jaurès, les avocats de sa veuve refusent de réclamer la mort et ils limitent leur défense à faire valoir la grandeur de la victime en oubliant le crime et le criminel. L'avocat de ce dernier, Alexandre Zévaes, en profite et établit le parallèle entre Émile Cottin et Raoul Villain en portant l'accent sur l'enjeu idéologique : "Entre Villain et Cottin, qu'y a-t-il ? Il y a la patrie, la patrie méconnue, niée par l'un, exaltée par l'autre jusqu'à la passion, jusqu'à l'égarement, jusqu'au geste meurtrier !".
Les jurés, ne voulant en aucune façon désavouer le sacrifice d'un million et demi de soldats, vont donc acquitter l'assassin qui a cru agir pour la défense de la patrie. Villain est acquitté et la veuve de Jaurès condamnée à payer les frais de justice !

C'en est trop pour la gauche et les modérés. Pour la première fois depuis le début de la guerre, on voit ressortir le drapeau rouge et monter le chant de L'Internationale.

Finalement la peine d'Émile Cottin est commuée en 10 ans de travaux forcés par le Président Raymond Poincaré.

En mai 1924, la victoire du Cartel des gauches aux élections législatives va conduire à la panthéonisation de Jean Jaurès mais aussi à la liberté d'Émile Cottin, érigé en martyr de la gauche ! Ce dernier va immédiatement retomber dans l'oubli et vivoter jusqu'en 1936, date à laquelle il rejoindra les milices anarchistes engagées dans la guerre d'Espagne. Il se fait alors tuer sur le front de Saragosse le 8 octobre 1936.


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia. Pour les curieux : de Jean-Yves Le Naour - L'Assassinat de Clemenceau (Perrin, février 2019, 168 p

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vendredi 16 février 2024

L'Élysée en deuil


16 février 1899 - La dragée de trop


"Il voulait être César, il ne fut que Pompée !"

François Félix Faure, président de la République de 1895 à 1899

Ça s'est passé il y a 125 ans.

Cette réplique, devenue célébre est prononcée par Georges Clémenceau le 16 février 1899, lorsqu'il apprend la mort du président de la République Félix Faure, cinquante-huit ans, à l’Élysée "dans les bras" de sa maîtresse Marguerite Steinheil*.

Contrairement à la légende urbaine, il n’aurait pas succombé d’un excès de zèle de sa talentueuse maîtresse mais probablement du viagra de l’époque : la dragée Yse. Ce médicament, à base de phosphure de zinc, permet aux seniors de retrouver la virilité de leur jeunesse, mais présente le fatal inconvénient de bloquer la circulation rénale.

La journée du 16 février 1899 est chargée pour notre président : un conseil des ministres est réuni avec pour ordre du jour l’affaire Dreyfus. Passablement désabusé par cette perspective peu réjouissante, Félix Faure téléphone à Marguerite Steinheil et lui propose de venir le détendre vers 17h au Palais l’Élysée.

Félix Faure et l’huissier en charge des visiteurs du palais ont alors convenu d’un code pour signaler l’arrivée de Madame Steinheil : l’huissier doit sonner deux coups.

Le 16 février 1899, alors que le président attend fébrilement sa maîtresse, l’huissier sonne deux coups. Ni une ni deux, Félix Faure avale une dragée Yse et se précipite sur sa visiteuse, mais déception ! Ce n’est autre que le cardinal Richard, archevêque de Paris, qui entre dans le bureau présidentiel. Après cet entretien, Félix Faure enchaîne avec la visite du prince Albert 1er de Monaco venu plaider la cause du capitaine Dreyfus.

Cela provoque la fureur du président qui, par ailleurs, ne pense qu’à la suite de sa journée dans les bras de sa maîtresse.

À la suite de cet entretien houleux qui énerve passablement Félix Faure, l’huissier sonne deux coups.

Cette fois pas d’erreur, c’est bien Madame Steinheil qui se présente ! Albert 1er est sommairement congédié.

Avant de gagner le salon bleu réservé à l’intimité républicaine, Félix Faure se donne du courage en avalant une deuxième dragée. Ce sera la dragée de trop. Passablement éreinté et alors que Madame Steinheil débute ses diligences avec le talent qui la caractérise, Félix Faure fait un malaise sur le canapé.

Alerté par les cris du président et de sa maîtresse, le chef du cabinet Le Gall se précipite dans le salon. Il découvre Félix Faure en tenue d’Adam, ne portant plus que son gilet de flanelle, allongé sur un canapé et la main crispée dans la chevelure de sa maîtresse. Marguerite Steinheil, déshabillée, réajuste nerveusement ses vêtements en désordre et file à l’anglaise.

La mort de Félix Faure au palais de l'Elysée
(illustration parue dans le Petit Journal de 1899)

Félix Faure meurt vers 22h d'un "accident vasculaire cérébral" comme on relève pudiquement le soir même, dans la presse.

Les circonstances croustillantes du décès prirent rapidement le pas sur la tragédie d'une mort subite. La légende rapporta que l'abbé Herzog, curé de la Madeleine, fut mandé par Berthe Faure l'épouse du président pour lui administrer les derniers sacrements mais, sans attendre son arrivée, il fut remplacé par un prêtre de passage devant l'Élysée qui, en demandant à son arrivée : "Le président a-t-il toujours sa connaissance ?" se serait entendu répondre : "Non, elle est sortie par l'escalier de service !". 

Mme Faure habitant l'Élysée, la maîtresse dut en effet, pour éviter le scandale, s'éclipser tellement vite qu'elle en oublia son corset, vêtement que le chef de cabinet Le Gall a conservé en souvenir.

Le président eut droit à des obsèques nationales, célébrées le 23 février 1899, quant à Marguerite Steinheil, elle s'est exilée en Angleterre, y finir ses jours. La "pompe funèbre", comme elle était surnommée à Paris, meurt à quatre-vingt-cinq ans le 18 juillet 1954. à Hove dans le Sussex, ça ne s’invente pas !


* dite "Meg", épouse du peintre Adolphe Steinheil.

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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia. Pour les curieux : Armand Lanoux, "Madame Steinheil ou la Connaissance du président", éditions Bernard Grasset, Paris, 1983.

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lundi 12 février 2024

Charles III, dernier empereur carolingien


12 février 881 - Couronnement du denier empereur carolingien


12 février 881 : Charles III, dit le Gros, fils de Louis le Germanique, est couronné empereur d’Occident à Rome.

Charles III le Gros (838-888)

Ça s'est passé il y a 1143 ans.

Depuis près de cent ans, les Francs disposent du "principatus" sur l’Europe occidentale. Une charge qu’ils sont les premiers à relever depuis la chute de Rome au Ve siècle. Mais le partage de l’empire carolingien selon les règles successorales franques conduit progressivement à la dislocation de l’unité impériale.

Lorsque Charles III ceint la couronne impériale le 12 février 881, cinq empereurs francs l’ont déjà précédé.

Charlemagne en 800, puis son fils Louis le Pieux en 814, qui a été préalablement roi d’Aquitaine en 781. A la mort de Louis le Pieux en 840, la charge impériale revient à son fils aîné Lothaire 1er. Ce dernier convient avec deux de ses frères (Louis le Germanique et Charles le Chauve) d’un partage de l’empire franc en trois au cours de la célèbre signature du traité de Verdun de 843.

C’est l’acte de naissance des royaumes de Francie orientale (la future Germanie) de Francie orientale (la Gaule, qui deviendra plus tard la France) et de Francie médiane.

Le royaume de Francie médiane échoit à Lothaire, on appellera progressivement ce territoire Lotharingie en mémoire de son fondateur, dont la Lorraine (en allemand Lothringen) est l’héritière. Au cours de son règne, Lothaire cherche à conserver le titre impérial au sein de sa propre famille. Il associe de son vivant son fils (futur Louis II le Jeune) à l’exercice du pouvoir en le faisant roi d’Italie en 844 puis Empereur d’Occident en 850. Lothaire et son fils Louis vont exercer conjointement la charge impériale pendant cinq ans, jusqu’à la mort de Lothaire en 855. Louis II dispose seul du titre d’Empereur des Romains jusqu’à sa mort en 875 à Brescia, ville italienne située actuellement en Lombardie.

Mort sans héritier, le titre impérial passe dans les mains de l’oncle de Louis II : Charles II le Chauve, qui attend ce moment depuis 843, année où il devient roi de Francie occidentale. Il ne profite toutefois pas longtemps de cette charge, il meurt moins de deux ans plus tard, le 6 octobre 877 à Avrieux (située actuellement en Savoie).

Sa mort entraîne une vacance du titre impérial qui sera réglée quatre ans plus tard par le sacre de Charles III le 12 février 881 à Rome par la pape Jean VIII, après lui avoir donné les assurances que celui-ci réclamait à propos des droits et privilèges de l'Eglise roamaine.

Ce dernier est le fils de Louis le Germanique, qui est mort en 876 sur le trône de la Francie orientale sans avoir pu prétendre au titre d’empereur. Charles III est le sixième et dernier empereur franc d’Occident appartenant à la dynastie des Carolingiens.

Il ne garde la charge que six ans. Le 11 novembre 887, Charles le Gros, que l'on dit "malade de corps et d'esprit", tient une assemblée à Tribur, en pays de Hesse, malade et abandonné de tous, il renonçe à la couronne impériale. il peut se retirer en Souabe, où il meurt le 13 janvier 888. La dernière tentative pour rétablir l'empire carolingien avait échoué. Sollicité dans toutes les directions par la menace normande, les troubles italiens, les intrigues des grands des deux France, Charles le Gros n'avait obtenu aucun résultat : l'empire de Charlemagne était définitivement disloqué.

Cinq autres empereurs de dynasties secondaires (widonide, bivinide, unrochide) se succéderont sur le trône impérial pendant plus de trente ans, de 891 à 924.

En 936, Otton liquide la dénomination de "Francie orientale" héritée du traité de Verdun de 843 et devient roi de Germanie. Il tire ainsi les conséquences du fait que les peuples situés sur la rive droite du Rhin sont des Germains et non des Francs métissés aux Gaulois et soumis à la discipline latine.

En 962, il se fera couronner Empereur des Romains, faisant définitivement basculer le titre impérial dans les mains germaniques.

C’est l’acte de naissance de l’entité que l’on appellera plus tard le Saint empire et qui aura vocation à unifier l’Occident sous bannière germanique pendant 844 ans.

Du côté de la rive gallo-romaine du Rhin, les grands seigneurs de Francie occidentale se réuniront en 987.

Ils nommeront roi des Francs Hugues Capet. Ses descendants gouverneront eux aussi plus de 800 ans le pays avec un maître-mot : l’indépendance, tant vis-à-vis de l’empire germanique que du Pape.


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dimanche 11 février 2024

Montmirail - 1814


11 février 1814 - Napoléon à Montmirail.

La bataille de Montmirail se déroule le 11 février 1814 lors de la campagne de France. Elle oppose l'armée française de Napoléon 1er aux troupes russes du général Osten-Sacken et prussiennes du général Ludwig Yorck von Wartenburg. L'affrontement se solde par une victoire française.

La bataille de Montmirail par Horace Vernet

C'est arrivé il y a 210 ans.

L'Empereur, selon Marmont, est ivre de joie après la victoire de Champaubert. Blücher a maintenant ses armées trop éloignées pour se regrouper rapidement.

Ce 10 février 1814 au soir, Napoléon ordonne à Nansouty, commandant de toute la cavalerie de la Garde, de partir à trois heures du matin avec les 1e et 2e divisions de cavalerie de la Garde et la brigade d’infanterie du 6e corps pour arriver à huit heures à Montmirail. La division Ricard, doit partir à la même heure, la division Friant à quatre heures du matin, et Ney avec deux divisions de la Jeune Garde à six heures.

Mortier, à Sézanne, avec la division Defrance, la 3e division de la Vieille-Garde, part le 11 février à l’aube vers Montmirail, Napoléon y arrive à huit heures du matin. Il doit attendre l'arrivée des troupes encore en arrière avant de commencer toute attaque. À dix heures, la Vieille Garde et le reste de la division Ricard arrivent.

À midi, les Russes prennent le village de Marchais. Napoléon envoie à l’assaut de ce village la division Ricard, qui s’en empare mais est rapidement repoussée. Ce village sera repris et reperdu cinq fois de suite ! Même Friand, avec la Vieille Garde, envoyés en renfort, sont à deux doigts d’être submergée par le grand nombre des alliés.

Vers 15 heures, arrivent enfin le maréchal Mortier avec la division Michel de la Vieille Garde et la cavalerie de Defrance. L’Empereur ordonne aussitôt à sa cavalerie, et aux dragons de la Vieille Garde du général Dautancourt de se lancer à l'assaut des lignes russes.

Les fantassins alliés, aux ordres du prince von Osten-Sacken, sont refoulés en désordre dans les bois à proximité. Le flanc droit de l’armée russe devient isolé de son centre. Les dragons de Dautancourt se lancent à la poursuite des fuyards, les rattrapent et les taillent en pièces. Dautancourt écrit plus tard: “les dragons, qui ne donnaient que des coups de pointe, en firent dans cet endroit une véritable boucherie”, et l’Empereur: “mes dragons ont accompli des miracles”.

L'infanterie française refoule les Russes au-delà de Marchais, et malgré l’arrivée tardive des Prussiens du général Ludwig Yorck von Wartenburg, et la grande disparité des effectifs, 16.000 français avec 36 canons, contre 30.000 alliés et 104 canons,...

La victoire est française.


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia. Pour les curieux aller sur le site : "https://aisne.com/le-territoireterre-de-memoire1814-la-campagne-de-france/11-fevrier-1814-la-bataille-de-montmirail"

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Marcus Antonius Gordianus (225-244)


11 février 244 - La mort de Gordien III.


Gordien III, né en janvier 225, meurt le 11 février 244, à l'âge de dix-neuf ans,
après approximativement six ans de règne.

Buste de Gordien III, musée de Pergame, Berlin.

C'était il y a 1780 ans.

En 238, dans le contexte d’ "anarchie militaire" qui secoue le monde romain entre la mort d’Alexandre Sévère (235) et l'avènement de Dioclétien (284), sept empereurs se succèdent entre janvier et mai dans un cycle rapide d'assassinats politiques et d'usurpations sanglantes.

Au début de 238, Maximin le Thrace et son fils Maxime, premiers princes issus de l'armée, étaient sur le Rhin pour combattre les Germains. Leur politique fiscale fut à l'origine de l'usurpation de Gordien 1er, gouverneur d'Afrique, associé à son fils, Gordien II. La rébellion fut écrasée mais les sénateurs romains firent aussitôt empereurs deux d'entre eux, Pupien et Balbin : le neveu de Gordien II, le jeune Gordien III, leur fut associé sous la pression du peuple et des prétoriens.

En représailles, Maximin marcha sur Rome mais fut tué par ses troupes. Pupien et Balbin connurent le même sort, et à la fin de mai, le jeune Gordien III, candidat du peuple de Rome et des prétoriens, reste seul au pouvoir et se maintint plus longtemps malgré la guerre contre les Perses grâce à l'énergie de son beau-père, le préfet du prétoire Timésithée, dont il épouse la fille Furia Sabinia Tranquillina en 241.

Les derniers mois de Gordien sont focalisées sur l’Orient, principalement contre les Perses. En Orient, le souverain sassanide Sapor 1er envahit la province de Mésopotamie et s'attaque à la Syrie. En réponse, Gordien organise une immense expédition pour le contrer, ouvrant symboliquement les portes du Temple de Janus avant son départ. En passant près du Danube, l'expédition rétablit l'ordre sur la frontière. Il repousse dans un premier temps les Perses, notamment à la bataille de Rhesaina, qui permet à Timésithée de récupérer Carrhes, Hatra, et Nisibis. Toutefois, Timésithée meurt, dans des conditions mal éclaircies, peu après cette bataille en 243. Gordien nomme alors deux nouveaux préfets du prétoire : Caius Julius Priscus et le futur empereur Philippe l'Arabe.

En février 244, les Perses mènent une immense contre-offensive contre l'armée romaine, stoppée à Ctésiphon. Les deux forces se rencontrent à Misiche, aujourd'hui Al-Anbar près de Falludja. Gordien est mortellement blessé pendant la bataille, décède peu après, et une grande partie de l'armée romaine est anéantie ou capturée.

On a longtemps cru qu'il avait été assassiné à la suite de cette défaite par son préfet du prétoire Philippe l'Arabe, son successeur contraint par Sapor 1er de payer la rançon des prisonniers. Toujours est-il que Philippe lui voue un mausolée pour montrer sa fidélité, avant de lui faire conférer l'apothéose.

Cette mort de Gordien en 244 fait glisser l’Empire romain doucement mais surement vers un premier épisode de son déclin... épisode qui aboutira, pour notre territoire, à l’instauration d’un Empire des Gaules entre 260 et 297.


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia.

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samedi 10 février 2024

Anne de Montmorency


10 février 1538 - L’épée de connétable de France à Anne de Montmorency


Au service de quatre rois, Anne 1er de Montmorency descend d'une fière famille qui se qualifie de "premiers barons chrétiens de France" !

Le connétable Anne de Montmorency, par François Clouet

Ça s'est passé il y a 486 ans.

François 1er décerne l’épée de connétable de France à Anne de Montmorency le 10 février 1538, alors la plus haute distinction. Le roi fait de lui son porteur en effet il a la charge du commandement général des armées en l'absence du roi et, en tout lieu, le connétable représente le roi et porte son épée. La cérémonie se déroule à Moulins, dans le Bourbonnais (auj. dépt de l'allier). Moulins est alors centre politique de premier ordre depuis qu’Anne de Beaujeu y a élu domicile après avoir quitté ses fonctions de "régente" du royaume à la majorité de son frère Charles VIII.

Cette récompense intervient dans le contexte de la Huitième guerre d’Italie qui oppose entre 1536 et 1538 François 1er à Charles Quint. On a coutume de réduire l’opposition entre les deux hommes au désastre de Pavie de 1525, on oublie de rappeler que l’affrontement a fini par tourner à l’avantage du Français.

En 1538, Anne de Montmorency a remporté une série magistrale de victoire contre les Habsbourg, venant clore la Huitième guerre d’Italie, cinq mois plus tard le 15 juillet 1538, avec la paix d’Aigues-Mortes signée entre François 1er et Charles Quint. Ce dernier cède à la France la Savoie et le Piémont, en contrepartie François 1er renonce à ses droits sur le Milanais. Les deux hommes conviennent surtout de faire front commun contre les protestants qui s’agitent tant en France que dans certains états du Saint empire.

Anne de Montmorency qui n’est alors que baron en 1538 entrera dans le cercle très fermé des plus proches conseillers du roi de France. La consécration viendra en 1551 lorsqu’il sera fait duc et pair de France par Henri II, le fils de François 1er monté sur le trône quatre ans plus tôt.

Ainsi en 1538, Anne ne fait que débuter cette ascension.


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Petit rappel

Filleul d’Anne de Bretagne à qui il doit son prénom, Anne de Montmorency est la figure majeure de Chantilly à la Renaissance. Compagnon d’enfance du roi François 1er, il est élevé avec lui au château d’Amboise et bénéficie de sa confiance ; il l’accompagne en Italie, notamment à Marignan en 1515 et à la bataille de La Bicoque, près de Milan, en 1522, est nommé premier valet de chambre du Roi en 1520, maréchal de France et chevalier de Saint-Michel en 1522.

Quand le roi est fait prisonnier à Pavie en 1525, il négocie l’échange du roi avec ses deux fils, puis leur libération. Le roi le récompense en lui octroyant des fonctions importantes : Grand Maître de France et Gouverneur du Languedoc en 1526, Connétable en 1538, et lui fait épouser en 1527 sa cousine germaine Madeleine de Savoie.

Sa fortune est immense, il possède six cents fiefs, cent trente châteaux, terres et seigneuries, quatre hôtels à Paris. A Chantilly, Anne confie à l’architecte de la cathédrale de Senlis, Pierre Chambiges, la transformation de la vieille forteresse médiévale en un château de la première Renaissance, puis fait élever au sud une aile nouvelle, le Petit Château, résidence de plaisance toujours visible à Chantilly par son architecte Jean Bullant, qui a aussi édifié pour lui le château d’Ecouen (musée national de la Renaissance) et la galerie de Fère-en-Tardenois.

Prince mécène, Anne de Montmorency est aussi un grand homme d’Etat et un grand militaire. Sous Henri II, qui a pour lui une affection filiale depuis sa libération des geôles espagnoles, il joue le rôle d’un premier ministre, mais est fait prisonnier à la bataille de Saint-Quentin. La mort accidentelle d’Henri II l’écarte des affaires au profit du clan des Guise, mais sous Charles IX Catherine de Médicis en fait son premier conseiller et son principal soutien pendant les Guerres de Religion.

Il meurt les armes à la main à la bataille de Saint-Denis au nord de Paris, face aux troupes protestantes de Louis de Condé, le 12 novembre 1567 à l’âge de soixante-quatorze ans.

Gisant d'Anne de Montmorency, actuellement conservé au Louvre

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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimédia. Pour les curieux : Thierry Rentet, "Anne de Montmorency : grand maître de François 1er", Rennes, Presses universitaires de Rennes, collection "Histoire", 2011.

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Mort de Baudouin III


10 février 1162 – Baudouin III meurt à Beyrouth.

Ça s'est passé il y a 862 ans.

Mort de Baudouin III, enluminure du XIIIe siècle

À l’exception de Godefroy de Bouillon (qui a renoncé au titre de monarque) Baudouin est le cinquième roi franc de Jérusalem, sur les dix-huit monarques qui ont régné de 1100 à 1250 en Terre Sainte.

Il appartient à la dynastie de Gatinais-Anjou qui, comme son nom l’indique, est originaire de ce territoire qu’on n’appelle pas encore la France.

Cette dénomination émergera en effet peu à peu avec le règne de Philippe Auguste, qui naît trois ans après la mort de Baudouin III, en 1165, et qui sera roi de 1180 à 1223.

Le père de Baudouin, Foulques V, est originaire d’Anjou, même s’il a passé une partie de son enfance à la cour royale à Paris.

La mère de Foulques, Bertrade, a en effet abandonné son mari pour rejoindre Philippe 1er de France. Mais Foulques a des prétentions territoriales ambitieuses. Il parvient à se faire désigner par Louis VI le Gros comme le successeur de Baudouin II du titre prestigieux de roi de Jérusalem.

Foulques aborde à Saint Jean d’Acre le 2 juin 1129 avec sa femme Mélisende de Jérusalem.

Après la mort de Baudouin II, Foulques et Mélisende sont tous deux sacrés roi et reine de Jérusalem au Saint-Sépulcre, le 14 septembre 1131.

Baudouin III né la même année, il constitue la première génération des Francs nés en Orient. Son père Foulques meurt le 10 novembre 1143 d’une chute de cheval. Baudouin est alors couronné roi de Jérusalem le 25 décembre de la même année en l'Église du Saint-Sépulcre de Jérusalem, il régnera dix-huit ans.

Couronnement de Baudouin III

Baudouin n’ayant que treize ans, un conseil de régence se met en place pendant sa minorité, conformément aux usages sous l’Ancien régime.

Le conseil de régence est alors présidé par sa mère Mélisende.

Au début du règne, la régence ne bouleverse par le statu quo : le royaume franc de Jérusalem reste allié à Damas contre Zengi, "atabeg" (noble) de Moussol et d’Alep.

Au grès de divers renversements d’alliance, la majorité de Baudouin III approche en 1152.

Mais sa mère s’est habituée à ses fonctions de régente et n’entend finalement pas céder sa couronne à son fils.

La même année, Baudouin est contraint de faire le siège de la Tour de David où sa mère s’est réfugiée, pour la bouter hors de Jérusalem.

À la fin de l’année 1152, Baudouin dispose enfin des coudées franches pour régner sur le trône de la ville Sainte. Son règne effectif durera dix ans, jusqu’en 1162.

Son principal opposant au cours de son règne est le fils de Zengi : Nur ad-Din.

Au grès de ses conquêtes en Terre Sainte, ce dernier n’est plus un simple atabeg comme son père mais devient émir de Damas (reprise aux Francs) et d’Alep.

Comprenant que l’arrivée de croisés francs ne suffira pas à défendre le territoire, Baudouin en appelle à Byzance, mais les discussions s’enlisent avec l’Empereur Manuel 1er.

Après avoir mené des campagnes militaires communes, Manuel opère un renversement d’alliance avec l’émir Nur ad-Din en mai 1159.

Ce renversement d’alliance est bénéfique pour Byzance (en plus de l’émirat d’Alep, les Seldjoukides de Rum font allégeance à l’Empereur d’Orient) mais affaiblit le royaume franc de Jérusalem qui se trouve isolé dans la région.

Baudouin III meurt à Beyrouth le 10 février 1162. On soupçonne le médecin tripolitain Barak de l’avoir empoisonné. Le monarque avait à peine trente ans.

N’ayant pas d’héritiers, la couronne de Jérusalem revient au frère cadet de Baudouin, qui monte sur le trône sous le nom d’Amaury 1er. Sa veuve Théodora Comnène reçoit Saint-Jean-d’Acre en douaire.


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimedia. Pour les curieux : René Grousset, "Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem", Paris, éditions Perrin, 1935, réimprimé en 2006.

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vendredi 9 février 2024

Qui a tué la Dame de Beauté ?


9 février 1450 - Fatale grossesse


Agnès Sorel, demoiselle d'honneur d'Isabelle 1ere de Lorraine, favorite du roi de France Charles VII, meurt avant l'âge de vingt-huit ans, après avoir donné naissance à une quatrième fille qui n'a pas survécu

Portrait d'Agnès Sorel d'après Jean Fouquet

Ça s'est passé il y a 574 ans.

Installée par le roi Charles VII au Manoir de la Vigne au Mesnil-sous-Jumièges près de Rouen, Agnès Sorel est soudainement prise d'un "flux de ventre", et meurt en quelques heures le 9 février 1450, recommandant son âme à Dieu et à la Vierge Marie et rappelant l’indulgence absolutoire "in articulo mortis" (à l’heure de la mort) accordée par le pape Nicolas V. Elle donne naissance à un enfant prématuré de sept mois, sa dernière fille, qui meurt rapidement après sa naissance. Elle est âgée de vingt-huit ans à sa mort, et meurt officiellement d'une infection puerpérale. Elle a le temps de léguer ses biens à la collégiale de Loches pour que des messes y soient dites pour le repos de son âme, à l'abbaye de Jumièges où est déposé son cœur, ainsi qu'aux membres de sa famille et au roi à qui elle lègue ses bijoux.

Sa mort est si rapide qu'on soupçonne un empoisonnement. Mais qui ? Jacques Cœur ? le Dauphin, futur Louis XI ? Son médecin Robert Poitevin ? Sa cousine germaine Antoinette de Maignelay ? 

L'analyse des restes de son cadavre, à l'occasion de l'ultime déplacement de son gisant dans l'église Saint-Ours de Loches, a révélé qu'elle était atteinte d'ascaridiose, son tube digestif étant infesté d’œufs d'ascaris ; et qu'elle avait absorbé une dose massive de sels de mercure, une purge utilisée à moindre dose en association avec la fougère mâle pour bloquer la croissance des parasites. Le mercure était aussi utilisé pour les accouchements longs et difficiles et pour les suites d'accouchement, mais là encore à dose nettement réduite par rapport à ce qui a été trouvé lors de ces récentes analyses. C'est l'ingestion d'une dose excessive de ce métal lourd qui a entraîné le syndrome dysentérique puis la mort en moins de 72 heures. Le mercure était alors administré sous forme liquide, dans des pilules de mie de pain pour prévenir les brûlures d'estomac. Cependant, la quantité de mercure détectée dans un poil de l'aisselle s'est révélée dix mille à cent mille fois supérieure à celle attendue de l'absorption de doses thérapeutiques, et il est difficile de croire à une erreur médicale. Le suicide est une hypothèse mais celle de l'empoisonnement de cette jeune mère vulnérable qui se relève de couches est nettement plus plausible.

Le premier coupable désigné est Jacques Cœur, son exécuteur testamentaire. Il est même accusé de l'avoir fait assassiner, mais c'est l'un des rares chefs d'inculpation dont il est lavé lors de son procès peu après la mort d'Agnès en effet les motifs manquent pour justifier cette hypothèse, et il n'est pas retenu comme auteur de ce crime - d'autant qu'Agnès, qui l'avait présenté au roi en premier lieu, soutenait son commerce auprès du roi.

Son médecin Robert Poitevin, qui était aussi un de ses trois exécuteurs testamentaires, était le mieux placé pour administrer le poison mais manquait lui aussi de motif. Il est par contre très possible qu'il ait reconnu les symptômes d'empoisonnement mais se soit tu, faute de pouvoir y remédier et, autre bonne raison, de peur d'y perdre sa place voire sa vie au vu de l'importance sociale du possible coupable.

Un autre suspect plus sérieux est le futur Louis XI, qui détestait Agnès pour avoir si bien fait oublier la reine sa mère dans la vie du roi, et a bien pu vouloir priver son père du soutien d'Agnès

Il y a aussi la cousine germaine d'Agnès, Antoinette de Maignelay connue pour la jalousie qu’elle portait à l’encontre de sa cousine, qui, trois mois après la mort d'Agnès Sorel, prenait sa place dans le lit du roi ; le roi la mariera rapidement, en 1450, au seigneur de Saint-Sauveur-le-Vicomte, André de Villequier, un de ses chambellans, et, peu après, Antoinette recevait la seigneurie d'Issoudun. Elle avait donc le double motif de jalousie et de cupidité

Qui était Agnès Sorel ?

Selon les historiens, Agnès Sorel serait née vers 1422, soit à Coudun, près de Compiègne en Picardie, soit à Fromenteau, en Touraine. Son père, Jean Sorel ou Jean Soreau, conseiller du vicomte de Chartres, est châtelain et seigneur de Coudun. Il épouse Catherine de Maignelays, fille de Jean Tristan de Maignelay, châtelain et seigneur de Verneuil-en-Bourbonnais. Agnès n’est pas fille unique, elle a quatre frères : Charles (écuyer du roi), Louis (écuyer), André (chanoine à Paris), et Jean (seigneur de Saint-Gérand). Il semble que certains membres de sa famille soient connus des historiens, comme Geoffroy Soreau, son frère ou son cousin, ou peut-être son oncle, évêque de Nîmes puis de Châlons, ou encore Jean de Maignelay, capitaine gouverneur de Creil.

Agnès est issue de la petite noblesse. A ce titre, elle reçoit une éducation soignée en Picardie. Les historiens s’accordent à dire qu’elle aurait vécu au château de Maignelay-Montigny. Selon l’usage, elle aurait été préparée à occuper la charge très enviée de demoiselle de compagnie d’Isabelle, duchesse de Lorraine, reine de Sicile et femme du roi René, beau-frère de Charles VII. Cette charge lui était destinée dès son plus jeune âge du fait de sa naissance et des recommandations dont elle bénéficiait.

Selon les historiens, s’appuyant essentiellement sur les chroniques de Monstrelet ou de Jean Chartier, la rencontre entre le roi et la jeune femme a lieu à Toulouse, le 19 mars ou septembre 1443. Agnès paraît pour la première fois et le roi est impressionné par sa beauté. L’année suivante, il semble que le roi la fasse entrer au service de la maison angevine. Officiellement, elle est demoiselle de la maison de la reine Marie d’Anjou. Elle passe par la suite au rang de première dame officieuse du royaume de France puis gagne rapidement le statut de favorite officielle. C’est une nouveauté ! Les rois avaient jusque-là des maîtresses mais celles-ci se devaient de rester dans l’ombre… Charles VII lui-même a eu différentes maîtresses mais elles n’auront jamais acquis l’importance d’Agnès Sorel.

L’art de vivre et l’extravagance d’Agnès Sorel poussent la reine au second plan. Elle invente le décolleté épaules nues ; de vertigineuses pyramides surmontent sa coiffe, des traînes longues allongent ses robes bordées de fourrures précieuses. Elle traite sa peau avec onguents et crèmes. Elle maquille ses lèvres de rouge, se fait épiler les sourcils et les cheveux sur le haut du front. La mode suit Agnès Sorel et elle n’hésite pas à se rapprocher des meilleurs marchands pour se procurer ces précieux atouts. Elle devient la meilleure cliente de Jacques Cœur.

Agnès Sorel maîtrise parfaitement l’impact de son influence auprès du roi. Elle lui impose ses amis, s’acquiert la faveur de ses conseillers et se fait octroyer différents fiefs jusqu’à se faire offrir le domaine de Loches où elle fait aménager le château qui surplombe la ville.

Agnès Sorel a plusieurs enfants avec Charles VII. Elle lui donne trois filles, surnommées les bâtardes de France. Cependant, le roi légitime ses filles et les dote richement. De cette union, naît : Marie de Valois qui épouse Olivier de Coëtivy, sénéchal de Guyenne ; Charlotte de Valois qui épouse Jacques de Brézé, sénéchal de Normandie ; Jeanne de Valois qui épouse Antoine de Bueil, comte de Sancerre et chancelier du roi sous Louis XI.


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimedia. Pour les curieux : Jean-Christophe Rufin, Le Grand Cœur, Paris, Gallimard, 2012, 497 p, (Folio n°5696).

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jeudi 1 février 2024

Mort de Sigebert III


1er février 656 – Sigebert III disparaissait.


Baptême de Sigebert III
Jacobus de Voragine, enluminé par Monbaston

Ça s'est passé il y a 1368 ans.

Sigebert III ou Sigisbert III, également connu sous le nom de saint Sigisbert, est le fils aîné du redouté Dagobert et de sa concubine Ragnétrude.

Il voit le jour en 630 et est baptisé alors qu’il a à peine neuf jours en la cathédrale d’Orléans.

Le baptême de Sigebert est célébré en présence de son père Dagobert et de ses plus proches conseillers, notamment le célèbre Eloi, la reine Nanthilde, le trésorier royal Landégisèle ainsi que le référendaire Chadoin en tant que représentant de Burgondie. L'évêque Amand procéda au baptême et Caribert II, frère de Dagobert, parraina Sigebert en le tenant sur les fonts baptismaux. Lors de l'office, Amand récita le pater noster et Sigebert, âgé alors de neuf jours, aurait répondu "Amen".

Malgré la conquête du royaume d’Austrasie en 613 par son grand-père Clotaire II, les couronnes franques de Gaule restent séparées.

C’était une condition posée par la noblesse austrasienne : ces derniers acceptent de réunir le Regnum Francorum à la condition de disposer d’un roi particulier.

C’est dans ce contexte que Clotaire II dépêche son fils Dagobert sur place, lequel devient roi des Francs d’Austrasie en 623. Conformément à l’usage, le fils de Dagobert hérite lui aussi de la charge de roi des Francs d’Austrasie en 639.

Sigebert épouse Chimnechilde en 647. Après quelques années, ils n'ont toujours pas d'enfants et son maire du palais Grimoald le persuade qu'il n'aura pas d'héritier, et le convainc d'adopter son propre fils, nommé Childebert. Mais coup de théatre, quelques années plus tard, Chimnechilde est enceinte et met au monde deux enfants : Dagobert (futur Dagobert II) et Bilichilde (future épouse de Childéric II)

Sigebert III régnera plus de dix-sept ans sur l’Austrasie, de 639 à 656, avant de mourir, pour certains de maladie, pour d'autres assassiné, le 1er février 656 alors qu’il a à peine vingt-six ans. Suite à cette mort, Se sentant menacé, Grimoald se débarrassa du petit Dagobert, agé de trois ans, en l'enfermant dans un monastère en Irlande et mit sur le trône son fils. Ce coup de force entraîna une réaction de la Neustrie, Grimoald fut fait prisonnier. Quant à Childebert "l'adopté", il fut roi d'Austrasie jusqu'à sa mort en 662. Dagobert II, propre fils de Sigebert III, montera sur le trône d'Austrasie qu'en 676, apres le règne de Childéric II, successeur de Childebert "l'adopté".

Les restes de Sigebert III, profanés à la Révolution, sont conservés à la cathédrale Notre-Dame-de-l’Annonciation et Saint-Sigisbert de Nancy, ville dont il est le saint patron.

D'abord objet d'une dévotion strictement locale, il fut reconnu saint cinq siècles après sa mort et canonisé par l'Eglise catholique, il est fêté à Nancy le 1er février.


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Source : Article partiellement ou en totalité issu de Wikimedia. Pour les curieux : Ivan Gobry, Pépin le Bref, Pygmalion, coll. "Histoire des rois de France", 2012

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Calixte II


1 février 1119 – Election d'un pape bourguignon.

De son vrai nom Gui de Bourgogne, né au château de Quingey (Doubs) vers 1060,
est issu d’une famille des comtes palatins de Bourgogne.
Elu le 1er février 1119, il est intronisé pape à Vienne (Isère) le 9 février.
Il meurt à Rome le 13 décembre 1124.

Calixte II (1060-1124), gravure du XVIII siècle

Ça s'est passé il y a 905 ans.

Guy de Bourgogne naît à Quingey (Doubs) vers 1060. Il est le fils de Guillaume le Grand, comte palatin de Bourgogne, et d’Étiennette de Vienne. Il est donc proche parent de toutes les familles royales d’Europe : oncle du roi d’Espagne et de la reine de France, cousin de l’empereur d’Allemagne et du roi d’Angleterre.

Guy de Bourgogne commence sa carrière ecclésiastique en 1085 comme Chanoine à la Cathédrale St Jean de Besançon. En 1088, il est Archevêque de la Ville de Vienne au sud de Lyon. Le 1 février 1119, il est élu à Cluny, devient le 162ème pape de l’Église Catholique. Il sera intronisé à Vienne (Isère) le 9 février. Il succède ainsi au Pape Gélase et reçoit le nom de Calixte II. Il exercera son Pontificat 5 ans, jusqu’en 1124, année de sa mort.

Il eut à lutter contre l’antipape Grégoire VIII soutenu par l'empereur Henri V du Saint-Empire. L'antipape se soumettra à Calixte II en 1121.

L’année de son élection à la papauté, il dénonce l'expansion de l'"hérésie cathare", il préside un concile à Toulouse (le 8 juillet) qui décrète la condamnation des cathares de cette région qui nient les sacrements et rejettent le sacerdoce; ceux-ci seront remis au bras séculier; le canon 3 dénonce "ceux qui affectant l’aspect d’un ordre religieux condamnent le sacrement du corps et du sang du Seigneur, le baptême des enfants, le sacerdoce et les autres ordres ecclésiastiques, et les liens des mariages légitimes." (Innocent II, au concile du Latran de 1139, reprendra dans le canon 23 le canon 3 de ce concile); le concile condamne aussi les défenseurs de l’hérésie et prescrit la répression au pouvoir politique.

Son frère Raymond de Bourgogne étant Roi de Léon et Galice, par son mariage avec Urraca, la fille d'Alphonse VI, Calixte entretient des liens étroits avec Compostelle, c’est grâce à lui que cette ville deviendra archidiocèse. En 1120, c’est sur ses ordres que la Cathédrale de Santiago sera construite ! En ce début de XIIème siècle, le rayonnement de Compostelle prend un nouvel essor. Il suscite l’écriture du Codex Calixtinus pour assurer la dévotion à l'Apôtre du Christ, St Jacques le Majeur, venu évangéliser l'Empire romain jusqu'à Saint-Jacques-de-Compostelle, au 1er siècle et dont les saintes reliques reposeront dans la nouvelle cathédrale. Il assure la promotion du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle dans toute l'Europe. En 1120, Diego Gelmírez est nommé archevêque et son légat, à cette époque Saint-Jacques-de-Compostelle rivalise avec l’archevêché de Tolède.

En 1122, Calixte II régle avec l’empereur Henri V, à l’avantage de l’Eglise, la Querelle des Investitures, opposant les papes au Saint empire romain germanique depuis plus de quarante ans, par le Concordat de Worms le 23 septembre 1122, qui est ratifié l’année suivante au concile du Latran, 16 mars-11 avril 1123, à la basilique Saint-Jean-de-Latran de Rome

Sur le plan extérieur, il appelle à la Croisade. Dès 1123, dans une bulle, le pape Calixte II place sur le même plan, quant aux récompenses spirituelles, Jérusalem et l’Espagne. 

Il participe à la fondation de l’ordre du Temple pour la protection des pèlerins qui voyagent pour aller prier dans le saint sépulcre de Jésus-Christ à Jérusalem, dans le contexte de la guerre sainte et des croisades. Il participe également à la mise sur pied de l’ordre cistercien, en approuvant le 23 décembre 1119 à Saulieu, la "Carta Caritatis" ou Charte de charité, texte constitutionnel fondamental sur lequel repose la cohésion de l'ordre.

Son pontificat est pourtant relativement court : cinq ans.

Il meurt à Rome, à l'âge de 74 ans, le 13 décembre 1124, Honorius II lui succède.


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Pour les curieux : Gilles-Marie Moreau, "Calixte II", Paris, L'Harmattan, 2019

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