15 mars 44 av. J.-C. - L'assassinat de César.
Cerné par une mêlée confuse de conjurés fébriles, le dictateur succombe sous les coups de poignard. L'assassinat de César était censé rétablir la République. Il contribuera au contraire à instaurer l'Empire.
La mort de César, un meurtre fondateur. |
Ça s'est passé il y a deux mille soixante-huit ans.
César a une soif de pouvoir sans limites. Ses nombreuses conquêtes militaires (guerre des Gaules, bataille de Pharsale, Thapsus en Afrique, etc.) et la prospérité de Rome lui valent la confiance du peuple et des sénateurs. En 48 av. J.-C., de consul de Rome il devient dictateur, fonction qui ne peut en principe être exercée que pendant les périodes de catastrophes nationales, puis dictateur à vie, en 44 av. J.-C. Son ambition démesurée inquiète les défenseurs de la République.
Le dictateur est trahi par des sénateurs. Le cerveau de l’opération est Caius Cassius Longinus qui va solliciter l’aide de Brutus. Tous deux étaient des anciens partisans de Pompée, l’adversaire de César pendant la guerre civile de 49 av. J.-C. Le troisième homme de l’opération est Decimus Brutus Albinus, lieutenant et ami proche de César. Autour d’eux, ils réunissent une soixantaine de conspirateurs.
Les comploteurs retiennent le scénario de l’assassinat en pleine séance du Sénat, le jour des festivités des ides de Mars. Car le temps presse. César doit partir en expédition trois jours plus tard contre les Parthes, dans la Perse antique. Et les conjurés veulent absolument empêcher une nouvelle guerre, surtout contre ce peuple de redoutables guerriers. Le 15 mars 44 av. J.-C., alors que la ville est en fête, les assassins attendent leur proie à l’entrée de la curie de Pompée, sur le Champ de Mars, où doit se dérouler la réunion.
César arrive vers 11 heures à la réunion. La mine pâle, il est transporté sur une litière. Le tyran a été malade dans la nuit. À son entrée, les sénateurs se lèvent en son honneur. L’un d’eux, Lucius Tillius Cimber, lui présente une supplique de la part de son frère en exil. César lui répond par un geste dédaigneux de la main. Le ton monte entre les deux hommes. Tillius saisit César par le col à deux mains. C’est le signal de l’attaque. Cassius tire son poignard et vise le cou du dictateur. Tous les hommes se mettent à frapper.
César reçoit 23 coups de couteau. Il pousse, dit-on, des hurlements de fauve. Dans le groupe de ses assassins, César voit Brutus, le fils de sa maîtresse Servilia, qu’il a vu grandir. L’historien Suétone rapporte que César lui aurait alors dit en grec : "Kai su teknon !" ("Toi aussi, mon petit !"). Traduit en latin par "Tu quoque mi fili !" (littéralement "Toi aussi, mon fils"), ces derniers mots alimenteront la fausse rumeur que Brutus était le fils de César.
Quelques semaines avant sa mort, l’haruspice Spurinna, un devin étrusque, avertit César de " prendre garde à un péril qui ne serait pas reculé au-delà des ides de Mars". Mais le tyran ne se doute pas qu’il s’agit de sa mort. L’historien Appien raconte que, la veille de l’assassinat, César dîne chez son maître de la cavalerie, Lépide, en compagnie de son ami Decimus Brutus Albinus (l’un des traîtres). Ivre, il lance comme sujet de conversation : "Quelle est pour l’homme la meilleure mort ? " Et d’argumenter qu’il préférerait une mort soudaine et inattendue…
À l’entrée de la curie, César décide de reporter la réunion. Comme le veut la coutume, avant un événement important, un prêtre examine les entrailles d’un animal sacrifié pour avoir l’assentiment des dieux. Ce jour-là, on tue trois bêtes et on n’y voit que des mauvais présages. Mais Decimus Brutus Albinus convainc César de maintenir la réunion. En chemin, le rhéteur Artémidore lui remet un billet, dans lequel il lui révèle le complot. "Lis ceci, César, seul et tout de suite, il s’agit d’affaires d’une extrême importance pour toi", insiste-t-il. César le tient encore dans sa main quand il est tué, sans avoir pu le lire.
À la sortie de la curie, la vue de ces hommes ensanglantés, un poignard à la main, sème la panique. On verrouille les portes des maisons, les volets claquent, les échoppes sont désertées. Brutus et les conjurés se réfugient au Capitole pour se mettre à l’abri.
Les conspirateurs avaient prévu de jeter le corps de César dans le Tibre, sans cérémonie. Mais Marc Antoine, qui se retrouve au pouvoir, insiste pour qu’aient lieu des funérailles publiques. Le 20 mars, on dresse le bûcher sur le Champ de Mars. La lecture du testament galvanise l’assistance : César lègue trois pièces d’or à chaque citoyen romain ! Dans un accès de frénésie, les vétérans jettent leurs armes dans le bûcher et les femmes leurs bijoux pour manifester leur douleur.
Les conjurés ne sont pas jugés. Mais peu de temps après les funérailles, Cassius et Brutus s’exilent par peur de la vindicte populaire.
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Source : Texte inspiré de l'article écrit par Julia Zimmerlich de l'équipe "Ça m'intéresse", le 27/09/2021.
Pour les curieux : Barry Strauss, La mort de César, Albin Michel, 2018, 334 p. Traduit de l'anglais par Clotilde Meyer.
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