29 janvier 1635 - Conrart avant Richelieu ?
Richelieu entend mettre la littérature et la langue sous contrôle, et prendre jusqu’à la direction des belles-lettres.
Depuis déjà 1629, Valentin Conrart, protestant calviniste, conseiller du roi Louis XIII, l'un des habitué de l'Hôtel de Rambouillet (le salon littéraire tenu par la marquise du même nom), recevait chez lui, au 135 de la rue Saint-Martin, une fois par semaine quelques particuliers désireux de s'entretenir de leurs études de prédilection. Ces hommes, des grammairiens et des lettrés, débattaient sur des questions de langue, et se lisaient entre eux les travaux manuscrits qu'ils avaient l'intention de publier. Leur société, le "cercle Conrart", dont l'existence était en théorie secrète, s'accrue peu à peu de nouveaux membres et commençait à prendre de l'importance. En plus des membres fondateurs tels que Valentin Conrart, Jean Chapelain et Jean-Louis Guez de Balzac, on côtoyait dans le salon de la rue Saint-Martin, Antoine Godeau, Jean Ogier de Gombauld, Philippe Habert, Claude Malleville, François Le Métel de BValentin Conrartoisrobert, Jean Desmarets de Saint-Sorlin, Nicolas Faret, Paul Pellisson.
En 1633, François Le Métel de Boisrobert, membre du cercle et secrétaire de Richelieu informa le cardinal de l'existence de ces réunions. Très vite, ce dernier s'intéressa aux activités de cette compagnie d'intellectuels, dont il entrevoie les prémices de son projet pour créer son "académie". Il proposa aux membres de leur offrir sa protection et de l'organiser en un corps officiel. Hésitants, les hôtes de Conrart auraient préférés continuer de se rassembler librement comme ils le faisaient depuis plusieurs année. Mais comment refuser un si prestigieux patronage auquel certains d'entre eux souscrivaient déjà en privé?
Ils cédèrent aux désirs du puissant cardinal et quittèrent le mode des entretiens familiers et informels pour s'organiser de manière régulière, à l'instar des académies déjà existantes en Italie, à Florence notamment, avec la "Accadémia fiorantina" et la "Accadémia del désigno" placées sous la protection de Cosme de Médicis.
Conrart fut tout désigné pour en dresser les lettres patentes. Seules contraintes du cardinal : "que les statuts soient soumis à son approbation, que le nombre des membres soit porté à quarante et que le choix indépendant de la naissance, de la fortune et de la situation acquise ne prenne que le talent en considération". La rédaction et la première lecture furent faite, autour de vingt-sept membres, lors de la réunion du 13 mars 1634.
Le 22 mars, un projet, soumis à l'agrément du cardinal, proposa au cercle l'appellation d'Académie française. Le projet approuvé, l'Académie française était fondée. Le garde des Sceaux, Pierre Séguier, duc de Villemoze, scella les lettres patentes justifiant la constitution de l’Académie le 4 décembre 1634. Elle sera définitivement officialisée par la signature de Louis XIII au bas des parchemins, le 29 janvier 1635, date retenue comme la naissance officielle de l'Académie. Le parlement de Paris n'enregistrera "l'acte de naissance" que le 31 juillet 1637.
Treize nouveaux membres, appelés " académistes " puis " académiciens " à partir de février 1635, sont admis à siéger avec le groupe initial dont Richelieu est devenu le père protecteur. Leur mission première : "se préoccuper de la pureté de la langue et la rendre capable de la plus haute éloquence". Conrart en est le premier secrétaire et, malgré son attachement inébranlable à la religion protestante, Richelieu le maintient dans cette fonction jusqu'à sa mort.
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La composition de l'Académie au 13 mars 1634 ne comprenait que 27 "académistes" dont : Valentin Conrart - F2, Jean Desmarets de Saint-Sorlin - F4, Jean Ogier de Gombauld - F5, François Le Métel de Boisrobert - F6<, Jean Chapelain - F7, Claude Malleville - F8, Antoine Godeau - F10, Philippe Habert - F11, Jean-Louis Guez de Balzac - F28
Surnommés « les Immortels », les académiciens doivent ce surnom à leur devise « A l’Immortalité ». Celle-ci figure sur le sceau donné à l’Académie par le cardinal de Richelieu, et vise à l'origine la langue française et non les académiciens. Rapidement, cette notion s'est étendue aux académiciens pour leur gloire posthume.
A la mort de Richelieu en 1642, Les « Immortels » choisissent le chancelier Séguier (qui avait scellé les lettres patentes le 4 décembre 1634) comme père protecteur. Mazarin ne parlait pas assez bien le français! A la mort de Séguier, le nouveau père protecteur est le roi Louis XIV. Dès lors le titre appartiendra à tous les rois ou chefs d’État.
Pour les curieux : http://academie-francaise.fr/
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